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Je me rappelle une conversation que j’ai eue il y a quelque temps avec une personne bien renseignée à Ottawa (qui ne travaille pas aux Affaires étrangères) et dont je préserverai l’anonymat. Je lui ai dit que dans mes loisirs j’essayais de voir si quelqu’un au gouvernement s’était livré à une sérieuse analyse politique de la situation en Afghanistan avant que nous décidions d’y engager nos forces. Je savais, bien sûr, que de grands intérêts diplomatiques étaient en jeu. Un important déploiement canadien renforcerait sans conteste notre position au sein de l’OTAN. Il pourrait réparer de graves dommages à Washington. De manière plus précise, nos dirigeants politiques, soutenus par des membres influents du cabinet du premier ministre, ont peut-être pensé qu’il s’agissait d’une solution de rechange acceptable à l’intervention sur le terrain en Iraq, un point de vue qui pourrait en théorie avoir été partagé, bien qu’avec une certaine dose de déception, à Washington. Bref, de façon générale, nos amis – c’est-à-dire ceux qui ont les mêmes dispositions d’esprit que nous – étaient tous en faveur d’une telle intervention et il y allait de notre intérêt de faire cause commune avec des amis qui pensent comme nous. Mais le problème réel, il me semble, était de savoir si la tâche elle-même pouvait être menée à bien – et pour pouvoir formuler quelques commentaires à ce sujet, une analyse globale des conditions sur le terrain aurait semblé nécessaire. Évidemment, nous aurions pu accepter et ensuite faire nôtres les analyses d’autres sources, si nous les avions trouvées convaincantes. Sur des questions aussi complexes, en tout cas, rien n’est jamais certain. Mais l’incertitude est une question de degré. Avons-nous essayé, dans la mesure du possible, d’évaluer à l’avance les dangers? Savions-nous dans quoi nous nous embarquions?
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