|
Le 24 mai 1873, à l’âge de 22 ans, John Wilson Bengough lançait le premier numéro du Grip. Durant 20 ans, cet hebdomadaire torontois publierait des calembours, des blagues, des satires et surtout des dessins humoristiques sur à peu près tous les sujets dont on discutait au Canada à la fin du xixe siècle. Baptisé Grip comme le corbeau qui accompagne régulièrement le personnage central, simple d’esprit, de Barnaby Rudge, roman de Charles Dickens paru en 1841, ce petit magazine s’inspirait probablement du Punch de Londres, dont Bengough admirait beaucoup le caricaturiste, John Tenniel. Rédacteur en chef et éditeur du Grip, Bengough en était aussi le principal auteur. Sa présence s’y manifestait dans d’innombrables poèmes, dans des calembours choquants, dans des paragraphes satiriques de même que dans les « croassements et coups de bec » du corbeau. En général, son humour n’était pas des plus raffinés : « Pour cultiver le sentiment national au Canada, faites pousser de l’orge », « Menace fénienne : on craint une pénurie de whisky ». Toutefois, c’était surtout ses caricatures et dessins humoristiques qui retenaient l’attention dans le Grip. Certains occupaient une pleine page. Beaucoup révélaient l’influence de Thomas Nast, le grand caricaturiste républicain du Harper’s Weekly de New York. Ainsi, Bengough transforma l’éléphant républicain de Nast en symbole de la Politique nationale de sir John Alexander Macdonald*. D’autres, glissés çà et là comme pour remplir les blancs, étaient de savoureux commentaires sur la société ou sur des individus.
|